lundi 11 février 2013

Topchef ou l'art de "sublimer le produit"


Et c'est reparti. A peine a-t-on eu le temps de digérer la précédente saison que M6 remet le couvert avec son émission culinaire star : TOPCHEF. Sauf que cette année, avec une crise qui n'en finit pas de ponctuer nos fins de phrases fatalistes, le leitmotiv de l'émission est l'économie. La première a eu lieu lundi dernier. Petit retour sur cette mise en bouche. 

Chez M6, les candidats de télé-réalité culinaire sont des professionnels, pas d'amalgames possibles avec ces amateurs de TF1. A chaque fois qu'il est présenté, on n'oublie pas d'estampiller le candidat de son grade dans la cuisine où il officie : second, 1er chef de partie dans un palace parisien, chef de son propre restaurant, chef pour milliardaire… Il faut que ce soit bien clair dès le début, les participants sont issus d'une sélection de plus de 8.500 candidats ! Autant dire que M6 a choisi pour vous la crème de la crème des cuisiniers. On n'oublie pas évidemment les quatre chefs, à la fois guides spirituels et juges culinaro-divins qui chaperonnent les candidats et dont la sainte parole peut vous faire ou défaire un homme. Tels les quatre pieds de la table, ils sont le socle sur lequel peut se reposer le programme TOPCHEF. 

Seulement, l'heure est grave. La crise est bel et bien là. Apparemment ce n'est plus un lointain mirage effrayant. Les producteurs ont eu les chiffres ; la ménagère est plus que jamais dans la tourmente. Les courses sont devenues un casse tête. Comment concilier une alimentation équilibrée et savoureuse avec un budget qui se resserre. Sarcasme mis à part, la situation n'est pas très belle à voir. La part du budget des ménages consacrée à l'alimentation ne cesse de se réduire et le choix des produits est de plus en plus difficile. Choix judicieux s'il en est un, celui de faire débuter l'émission au milieu de l'hiver : à l'heure où les clients d'AMAP rivalisent d'ingéniosité pour accommoder la citrouille, les deux choux et trois topinambours hebdomadaires et où la soupe lyophilisé est devenue l'eau bénite des agonisants grippés.

Du coup, cette année l'émission s'est "adaptée à de nouvelles contraintes". On va pouvoir apprendre à "ne rien jeter" ou "avec pas grand chose, faire quelque chose d'exceptionnel". Vous ne le saviez probablement pas mais on peut "faire un menu de palace avec 7,40€". Pour la première épreuve, le décor est planté : un hypermarché. Stéphane Rothenberg, le présentateur de l'émission est formel, "la grande cuisine n'a jamais été aussi proche de [nous]." La problématique est posée par le chef Thierry Marx, il s'agit ici de préparer "un plat gastronomique servi sur les meilleures tables de France à base d'un produit manufacturé" ou en d'autres termes "comment faire d'un produit de grande consommation un plat gastronomique ?" 
Au delà d'être un concours de cuisine, TopChef a aussi une vocation d'éducation alimentaire. Une source d'inspiration dont les candidats sont pleinement investis de leur mission. Ainsi Yoni, avec un vocabulaire marketing de circonstance est conscient que son "but , c'est de prouver à la ménagère qu'en se creusant la tête, on peut arriver à faire quelque chose." Et oui sombre idiote, creuse toi la tête un peu !

Tous les candidats sont unanimes sur un point, celui que Topchef peut constituer un palier dans leur carrière professionnelle. Avec un chèque de 100.000€ à la clé, le contraire nous aurait étonné. Cette édition de Topchef est partie sur les chapeaux de roue avec des candidats sur-vitaminés à l'envie de bien faire et surtout de "sublimer le produit". On reste proche des gens et de la ménagère bien-aimée. Fait nouveau cette année, celui de voir pendant les coupures pub, l'un des candidats vanter les qualités du responsable poissonnerie de son hypermarché préféré.